Chapitre 4

La culture celtique

L'art celte : usages et ornements

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Modélisation 3D du Casque d'Agris, Alienor.org / Conseil des Musées, 2018

L’art celtique est l’expression visuelle d’un système d’idées partagé par l’ensemble des groupes celtes. La cohérence artistique de l’Europe celtique se manifeste par la récurrence des motifs et des thèmes, tels que fleurs de lotus, triscèles, quadriscèles, animaux fantastiques, masques anthropomorphes, frises de rinceaux, etc. Si la force créatrice des artisans se nourrit d’emprunts au monde méditerranéen, les Celtes n’ont pas seulement imité : ils ont sélectionné un nombre restreint de signes qu’ils ont adaptés aux besoins de leurs récits.

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Les colonnes repertorient l'évolution des différents motifs présents dans l'art celtique. Au cours des trois âges du Fer (colonnes 1, 2, et 3), la représentation des masques (ligne 1), du bestiaire (ligne 2) et des frises (ligne 3) évoluent. Crédits : Th. Lejars, CNRS, AOrOc, K. Gruel, CNRS, AOrOc.

Le début du IVe av. J.-C. marque un changement radical, une « métamorphose plastique », par rapport au courant artistique géométrique de l’époque précédente (hallstattienne) : les signes fusionnent et les motifs curvilignes s’enchaînent.  Jusqu’au début du IIe s., l’art celtique s’épanouit ; les liens avec l’art méditerranéen se diluent à mesure que le nouveau langage gagne en cohérence. La représentation de la figure humaine se cache désormais dans un enchevêtrement de courbes rinceaux curvilignes ; elle connait son ultime essor dans l’art monétaire de la dernière période.

Les vases en céramiques peintes à figures animalières comptent parmi les plus remarquables témoignages de l’art gaulois. Ces objets de prestige, qui connaissent leur apogée au milieu du IIe s. av. J.-C sont notamment localisés dans le nord-est du Massif central. Ce sont tous des récipients destinés au service de la boisson. Les animaux représentés sont toujours des quadrupèdes au poitrail bombé, à la panse pincée et à l’arrière-train rebondi. Ces figurations sont stylisées et les pattes, la tête, les oreilles et la queue ont des proportions et des formes variables. Ces vases sont probablement des accessoires de pratiques religieuses qui restent en grande partie à décrypter.

L'art celtique

"L'art celtique". René Joffroy, archéologue français (1915-1986) évoque l'originalité de l'art des Celtes.

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Vases peints à décor réservé sur fond en résille (milieu du IIe s. av. J.-C.)
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Vase peint à décor zoomorphe réservé sur un fond en aplat noir. milieu du IIe s. av. J.-C.
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Mise en regard des figurations animalières

L'artisanat: techniques et outils

La qualité des artisans celtes, leur maîtrise des arts du feu, est attestée dès le VIIIe s. Cet artisanat celte a en particulier été mis en lumière grâce aux fouilles du site de Bibracte, en Bourgogne, reprises dans les années 1980.

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Fouille d'un atelier de travail du fer

La qualité remarquable des vestiges mis au jour concernant le travail du métal a permis de relever les plans d’ateliers du travail du fer, d’analyser les alliages cuivreux et d’identifier les productions. Les ateliers comprennent une zone chaude, au sol sombre, consacrée au travail de forge (fusion d’alliages, cuissons, soudures) ainsi qu’une partie froide, bien éclairée, réservée aux élaborations, finitions et polissages. Ce type d’artisanat implique une production spécialisée avec des chaînes opératoires complexes.

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Maquette de l'atelier bronzier au Musée de Bibracte

Les sanctuaires et les pratiques culturelles

La connaissance des cultes religieux a été complétement renouvelée par l’étude de sanctuaires datant principalement des IIIe et IIe s. av. J.-C., notamment dans l’actuelle Picardie.

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"Plan du sanctuaire de Ribemont-sur-Ancre"
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"Sanctuaire de Corent"

Le sanctuaire de Ribemont-sur-Ancre (Somme), vaste lieu de culte gaulois et gallo-romain, a été fondé au début du IIIe s. av. J.-C. Les recherches sur ce site, qui a conservé des dépôts humains en place, probablement consacrés après une bataille, a permis de mieux comprendre les rituels gaulois. Le sanctuaire est constitué d'un enclos rectangulaire couvrant un peu plus d'un hectare, il est délimité par un fossé large de trois mètres et bordé, à l’intérieur comme à l’extérieur, par des constructions en élévation.

Il contient une fosse jonchée d’ossements humains et de chevaux accompagnés d’armes en fer. L’examen des ossements montre qu’il s’agit d’une population masculine de plusieurs centaines d’individus, tués au combat. Le sanctuaire dans son ensemble pourrait être un trophée monumental, érigé à l’emplacement d’un champ de bataille, tandis que l’enclos curviligne aurait été destiné à célébrer un culte héroïque.

Les pratiques cultuelles impliquent parfois des sacrifices, le plus souvent d’animaux, plus rarement d’êtres humains. Les animaux qui font l’objet de sacrifices peuvent être soit consommés dans le cadre de banquets ou de rituels, comme c’est le cas pour les porcs et les moutons, soit exposés, dans le cas des chevaux et des bœufs.

La statuaire celtique

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"Statues interprétées comme des figures d'ancêtres", Paule, Côte d'Armor, 1988, crédits A. Lepotier et A. Maillier

La statuaire en pierre a existé pendant tout l’âge du Fer, mais elle était probablement marginale par rapport à la statuaire en bois qui a presque totalement disparu. Si les plus anciennes rappellent les « kouroi » grecs archaïques, les Celtes abandonnent vite la représentation réaliste du corps au profit de formes originales qui cherchent à illustrer les pouvoirs ou les qualités de la divinité ou du héros représentés. Devant les statues grecques de Delphes, ils sont secoués d’un immense éclat de rire, comme l'explique Diodore de Sicile dans sa Bibliothèque historique.

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"Héros assis en tailleur", Glanum, fac-similé réalisé au CEPMR de Soisson avec restitution des éléments peints, Bouches-du-Rhônes 1930, crédits A. Barbet.
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Portique de Rocquepertuse, 2010, crédits A. Barbet.

Le pilier des Nautes

Le 16 mars 1710, des ouvriers démontent un mur ancien dans le chœur de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Ils découvrent des blocs de calcaire, dont les antiquaires de Paris s’approprient rapidement la découverte. De nombreux ouvrages voient le jour, menant à la reconnaissance internationale de ce qui s’avère être le Pilier des Nautes.

Chacun des quatre blocs du pilier (dont trois sont lacunaires) est sculpté sur ses quatre faces. Les ornements représentent des dieux, certains commanditaires, ainsi que la corporation des Nautes de Paris (navigateurs marchands). La dédicace a permis la datation au règne de Tibère (14 – 27 de notre ère).

<div class="sketchfab-embed-wrapper"><iframe width="640" height="480" src="https://sketchfab.com/models/18902631efd74170b86c3cc4e7b0c732/embed?preload=1" frameborder="0" allow="autoplay; fullscreen; vr" mozallowfullscreen="true" webkitallowfullscreen="true"></iframe> <p style="font-size: 13px; font-weight: normal; margin: 5px; color: #4A4A4A;"> <a href="https://sketchfab.com/models/18902631efd74170b86c3cc4e7b0c732?utm_medium=embed&utm_source=website&utm_campaign=share-popup" target="_blank" style="font-weight: bold; color: #1CAAD9;">Pilier des Nautes de la Seine</a> by <a href="https://sketchfab.com/AOROC?utm_medium=embed&utm_source=website&utm_campaign=share-popup" target="_blank" style="font-weight: bold; color: #1CAAD9;">AOROC</a> on <a href="https://sketchfab.com?utm_medium=embed&utm_source=website&utm_campaign=share-popup" target="_blank" style="font-weight: bold; color: #1CAAD9;">Sketchfab</a> </p> </div>

L’intérêt historique de ces pièces se porte principalement sur la juxtaposition de divinités romaines et celtiques et de la présence d’une inscription en alphabet latin qui les identifie. Ainsi Cernunnos, Smertrios , Esus et Tarvos Trigaranus côtoient Jupiter, Mars, Vulcain ou encore Mercure. Alors qu’au temps de l’indépendance gauloise, les images anthropomorphes divines ne sont pas attestées, l’iconographie du Pilier des Nautes révèle l’adoption de pratiques formelles d’inspiration romaine dès le début du Ier siècle, et suggère la possibilité d’un syncrétisme religieux dans l’Empire romain.

Enfin, cet acte d’évergétisme revendiqué par les Nautes de la Seine amène à interroger le statut social et politique des corporations marchandes. En offrant ce monument à Jupiter et à l’empereur, il ne fait aucun doute que les commanditaires ont cherché à montrer leur influence sur la vie politique de leur cité.

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©Réunion des Musées Nationaux - Musée de Cluny, Paris - C.Quatrelivre, doctorante Aoroc

Webographie

L'équipe d'AorOc est à l'origine de nombreux projets numériques de valorisation de l'Histoire et la culture celtiques.

Parmi ceux-ci, plusieurs projets grand public sont accessibles en ligne.

  • "Oppida", atlas des oppida celtiques ;
  • Une histoire du site archéologique de Ribemont-sur-Ancre ;
  • Un reportage sur les recherches menées à Lavau ;
  • Une restitution 3D du village gaulois d'Acy-Romance ;
  • Une reconstitution de l'oppidum de Corent ;
  • Le site de Bibracte ;
  • La chronique de la fouille de la tombe de Warcq et de celle de Lavau ;
  • Le portail de visualisation en ligne des données géo-référencées Chronocarto ;
  • Le site d'Aoroc.

Retrouvez également le dossier consacré aux Celtes sur Savoirs-ENS, le site de diffusion des savoirs de l'École normale supérieure.

Crédits

L'exposition Réinventer les Celtes à l'École normale supérieure a été réalisée grâce au soutien de

La DRAC Île-de-France,
Le service régional de l’archéologie, ministère de la Culture
L’Union Internationale des Sciences Préhistoriques et Protohistoriques (UISPP)
La fondation de l’École normale supérieure

L’Université PSL
L’Ecole normale supérieure
L’UMR Archéologies et philologie d’Orient et d’Occident (AOrOc, CNRS-ENS)
L’Institut National de la Recherche en Archéologie Préventive (INRAP)
La Réunion des Musées Nationaux – Grand Palais
Le Musée national du Moyen-Âge, Musée de Cluny, Paris
Le Grand-Duché du Luxembourg, musée
Bibracte EPCC
Bourges +, service archéologique
CG Seine-Saint-Denis, service archéologique
CG Allier, service archéologique
L’Université de Cergy-Pontoise, LPMN

 

Coordination de l’exposition

Katherine Gruel, Olivier Büchsenschütz

 

Conception et réalisation de l'exposition virtuelle

Maya Messaoudi, Annael Le Poullennec, Direction Ressources & Savoirs de l'Université PSL

 

Remerciements

Rémi Auvray, Salma El Blidi, François Ory (conception graphique)

Jessica Dubos, Jean-Baptiste Houal (reconstitutions 3D)

Nicolas Gérard (Enregistrements)
Antoine Moulin (Voix)

Thomas Crognier (QR codes)

Véronique Prouvost, Noëlle Aziz, Julien Fournigault, Jessica Malamba, Philippe Pommier (Communication de l'ENS)

 

Technologie

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