La plume & la truelle : méthodologies
Le texte de César
Les Commentarii de Bello Gallico de César, ensemble de sept livres qui relate sa victoire dans la guerre des Gaules, est un point de départ indispensable pour l’archéologie. L’approche archéologique et l’analyse des occurrences de mots permettent de confronter données de terrain et données textuelles. Cette approche croisée permet d’éclairer la perception qu’avait César de la société gauloise.
César tente une traduction latine de réalités étrangères et, dans un texte à visée politique, emploie des termes ou expressions dont le sens ne devient clair qu’une fois les occurrences mises bout à bout. Le vocabulaire militaire est au premier plan, même s’il fait œuvre de grande qualité littéraire et un plaidoyer en sa faveur, César doit remplir les normes d’un rapport au sénat. César décrit ainsi la tactique de la terre brûlée dans une expression récurrente : « aedificia, vicos et oppida incenderunt ». On y retrouve les trois niveaux génériques de l’organisation de l’habitat gaulois : la ferme isolée, le village et la bourgade fortifiée.
Les études épigraphiques et les langues celtiques
L’interprétation des inscriptions gauloises suppose une connaissance approfondie des langues celtiques médiévales et modernes, ainsi que de la grammaire comparée des langues indo-européennes. Chaque mot ou élément de mot gaulois est en effet susceptible d’être expliqué par la comparaison avec ces langues. Ainsi, les inscriptions grecques et latines ont presque toujours servi de modèle aux inscriptions gauloises. L’interprétation des inscriptions est menée conjointement par les archéologues, les historiens, et les épigraphistes.
À titre d’exemple, l’inscription bilingue de Briona (Italie du Nord) présente, de gauche à droite, un texte secondaire écrit verticalement, quatre roues de char, et, au centre, le texte principal. Les textes utilisent un alphabet gallo-étrusque appelé « alphabet de Lugano » mais on peut noter plusieurs signes de contacts avec le monde latin. En effet, le son [s] est noté soit « š » (alphabet étrusque), soit « s » (écriture latine).
La prospection géophysique
La technique de la prospection géophysique, alliée au travail de terrain, permet d’améliorer la précision des cartographies de sites archéologiques. Le processus se déroule en trois étapes.
Ensuite, la prospection magnétique révèle des fosses et des fossés enfouis.
Pour aller plus loin : accédez à l'outil gratuit Chronocarto.
Enfin, la fouille sur le terrain, suivie du retraitement de la carte permettent de mettre en évidence les clous du murus gallicus et les fours de réduction du fer.
Pour aller plus loin : regarder "La radiographie des villages gaulois" sur Savoirs-ENS pour en savoir plus sur les progrès de l'imagerie archéologique.
Les céramiques et pots : typologies, usages et reconstitutions
Les traces observées sur les céramiques permettent d’identifier des techniques de façonnage. Dans la région de l’actuel Berry, les vases fins du VIe s. sont peints au graphite ou à l’hématite, puis rehaussés de motifs géométriques réalisés à la barbotine (mélange d’argile et d’eau).
Au Ve s., l’utilisation de tournettes (plateaux tournants permettant de peindre sur les vases) révolutionne les modes de fabrication. Les tessons du Ve s. av. J.-C. retrouvés à Bourges témoignent par exemple de l’introduction d’un tour lent dans les officines de potiers. Les récipients sont d’abord façonnés par superposition de colombins (anneaux d’argile), puis les parois sont affinées et régularisées en « tournassant » le pot sur une tournette. La standardisation des récipients devient possible, tout comme le fait de les rendre plus fins et sinueux. C’est aussi l’époque où les couvercles apparaissent.
Les motifs peints disparaissent progressivement, au profit de cannelures (rainures verticales ou en hélice) ou de bandeaux peints à l’hématite (oxyde de fer). Au IVe s., les formes s’affinent encore et les cannelures sont remplacées par des moulures.
Pour aller plus loin : voir la conférence "Quels contenus pour quels vases ?" par Dominique Frère (Université de Bretagne-Sud, AOrOc).
L'analyse des matières organiques : pollens et miels
Pour identifier les contenus organiques des objets archéologiques, les scientifiques disposent d’un éventail de méthodes.
La spectrométrie de masse permet d’analyser de petits échantillons carbonés de manière extrêmement précise. De nombreux traitements chimiques sont nécessaires pour isoler les molécules qui présentent un intérêt dans l’échantillon. Cette technique a été utilisée pour étudier le contenu de la lampe massaliote de Bourges. D’origine méditerranéenne, celle-ci fonctionne originellement avec de l’huile d’olive. Les chercheurs s’attendaient à un contenu d’huile végétale, voire de graisse animale, mais la lampe contenait de la cire d’abeille.
La palynologie, ou étude des pollens, permet de reconstituer la flore de l’époque étudiée. Elle intervient dans l’analyse du contenu du chaudron en bronze trouvé dans la tombe princière de Hochdorf. Les scientifiques ont déterminé que celui-ci contenait de l’hydromel, boisson alcoolisée constituée d’un mélange de miels.Une cartographie des zones de butinage a en outre pu être établie pour représenter la provenance géographique des miels utilisés.
Pour aller plus loin : découvrir l'archéologie des produits biologiques via le projet bioarcheo piloté par l'ENS et l'Université de Bretagne Sud.
Webographie
L'équipe d'AorOc est à l'origine de nombreux projets numériques de valorisation de l'Histoire et la culture celtiques.
Parmi ceux-ci, plusieurs projets grand public sont accessibles en ligne.
- "Oppida", atlas des oppida celtiques ;
- Une histoire du site archéologique de Ribemont-sur-Ancre ;
- Un reportage sur les recherches menées à Lavau ;
- Une restitution 3D du village gaulois d'Acy-Romance ;
- Une reconstitution de l'oppidum de Corent ;
- Le site de Bibracte ;
- La chronique de la fouille de la tombe de Warcq et de celle de Lavau ;
- Le portail de visualisation en ligne des données géo-référencées Chronocarto ;
- Le site d'Aoroc.
Retrouvez également le dossier consacré aux Celtes sur Savoirs-ENS, le site de diffusion des savoirs de l'École normale supérieure.
Crédits
L'exposition Réinventer les Celtes à l'École normale supérieure a été réalisée grâce au soutien de
La DRAC Île-de-France,
Le service régional de l’archéologie, ministère de la Culture
L’Union Internationale des Sciences Préhistoriques et Protohistoriques (UISPP)
La fondation de l’École normale supérieure
L’Université PSL
L’Ecole normale supérieure
L’UMR Archéologies et philologie d’Orient et d’Occident (AOrOc, CNRS-ENS)
L’Institut National de la Recherche en Archéologie Préventive (INRAP)
La Réunion des Musées Nationaux – Grand Palais
Le Musée national du Moyen-Âge, Musée de Cluny, Paris
Le Grand-Duché du Luxembourg, musée
Bibracte EPCC
Bourges +, service archéologique
CG Seine-Saint-Denis, service archéologique
CG Allier, service archéologique
L’Université de Cergy-Pontoise, LPMN
Coordination de l’exposition
Katherine Gruel, Olivier Büchsenschütz
Conception et réalisation de l'exposition virtuelle
Maya Messaoudi, Annael Le Poullennec, Direction Ressources & Savoirs de l'Université PSL
Remerciements
Rémi Auvray, Salma El Blidi, François Ory (conception graphique)
Jessica Dubos, Jean-Baptiste Houal (reconstitutions 3D)
Nicolas Gérard (Enregistrements)
Antoine Moulin (Voix)
Thomas Crognier (QR codes)
Véronique Prouvost, Noëlle Aziz, Julien Fournigault, Jessica Malamba, Philippe Pommier (Communication de l'ENS)
Technologie
Drupal 7