Une figure internationale (1919-1934)
L'institut du Radium, un laboratoire moderne
En 1909, l’Institut Pasteur et l’Université de Paris signent un partenariat pour la construction d’un laboratoire de recherche moderne pour Marie Curie : ce sera l’Institut du Radium, créé grâce un legs de Daniel Iffla dit « Osiris » (1825-1907), grand mécène du XIXe
Il ouvre en 1914 au 11, rue Pierre Curie (devenue depuis rue Pierre et Marie Curie). Marie sera directrice du laboratoire de physique et de chimie situé dans le pavillon Curie jusqu’à sa mort en 1934.
Ce laboratoire devient un modèle dans l’étude des corps radioactifs et permet le développement de l’utilisation des radiations dans la lutte contre le cancer. Il s’agit alors d’un des principaux centres de recherche sur la radioactivité dans le monde.
Marie Curie et le Dr Claudius Regaud, directeur du pavillon Pasteur de l’Institut du Radium, parviennent à obtenir en 1920 la création de la Fondation Curie qui devient rapidement une référence internationale en matière de traitement des cancers par les rayonnements. Reconnue d’utilité publique en 1921, elle récolte des dons, afin d’agrandir les laboratoires de l’Institut du Radium. Sa mission est aussi de favoriser l’établissement de deux dispensaires en vue du développement d'applications thérapeutiques pour le traitement des cancers.
La Fondation Curie et l’Institut du Radium fusionneront cinquante ans plus tard, en 1970, pour devenir, en 1978, l’Institut Curie.
Dès la sortie de la guerre, Irène Curie devient la préparatrice particulière de sa mère au laboratoire. Elle sera remplacée à ce poste par Frédéric Joliot en 1924, alors qu'elle prépare son doctorat, soit deux ans avant le mariage des deux jeunes gens.
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Voyage aux États-Unis
Marie Curie continue d'enseigner, pour la Sorbonne à l’Institut du Radium, mais également dans d'autres contextes, par exemple aux Arts et Métiers.
En tant que « patronne » du laboratoire, elle est largement sollicitée pour des mondanités, exercice qu’elle n’apprécie pas particulièrement. Pourtant, la recherche de financement devient nécessaire : le radium qu’elle utilise pour ses travaux est très rare et très onéreux.
En 1921, une collecte est organisée aux États-Unis auprès d'associations de femmes, par une journaliste américaine Mary Meloney (1878-1843), admiratrice de la savante. Le but de l’opération est d’offrir à Marie Curie un gramme de radium, qui vaut à l’époque 100 000 dollars (environ 1 200 000 € actuels).
Celle-ci se rend, accompagnée de ses filles, aux États-Unis, où elle est accueillie triomphalement en mai-juin 1921. Elle va, durant six semaines, faire une véritable tournée dans l’Est des États-Unis.
Le président américain Warren G. Harding en personne lui remet une clef honorifique durant une cérémonie officielle à la Maison Blanche le 20 mai. Celle-ci ouvre un coffret contenant un gramme de radium.
La savante donne de nombreuses conférences dans les universités et collèges féminins où elle reçoit des diplômes honorifiques. Elle rend aussi visite à de grands industriels, par exemple dans les usines de radium à Pittsburgh, en Pennsylvanie, où a été préparé le gramme de radium qui lui a été offert. Bien que très fatiguée par le voyage, elle noue ainsi de fructueux contacts avec des collègues scientifiques et des ingénieurs.
Elle retournera d’ailleurs aux États-Unis en 1929 pour récupérer un second gramme de radium qu’elle offrira à l’Institut du Radium de Varsovie en Pologne.
Une savante mondialement reconnue
Désormais une personnalité scientifique incontournable, Marie Curie est amenée à participer à de nombreux congrès scientifiques et médicaux dans le monde entier.
Ses découvertes, ses prix Nobel, et son engagement dans la recherche et la lutte contre le cancer lui valent la reconnaissance de ses pairs.
Sous sa direction, les recherches sur les radiations et leurs applications biologiques et médicales se développent à l’Institut du Radium.
En 1922, Marie Curie est ainsi élue membre libre de l’Académie de médecine.
Sa reconnaissance prend une ampleur internationale. Marie Curie visite de nombreux pays pour défendre les activités scientifiques de son laboratoire et, au-delà, la recherche en général.
Elle devient ainsi vice-présidente de la Commission internationale de coopération intellectuelle de la Société des Nations à Genève. Elle s’y engage aux côtés d’Albert Einstein (1879-1955), qu’elle connaît depuis le premier Conseil de Physique Solvay, et du philosophe Henri Bergson (1859-1941). L’objectif de cette commission est de renforcer et consolider les actions en faveur de la culture, la science et la paix.
Jusqu’à son décès à l’été 1934, Marie Curie est amenée à parcourir le monde afin de rencontrer ses homologues scientifiques, mais également recevoir des prix et des honneurs (Prague en juin 1925, Rio de Janeiro en juillet-août 1926, Madrid en 1933, etc.).
La reconnaissance, bien que tardive, récompense une vie dédiée au travail et à la science.
Vidéo de l'unique enregistrement sonore de la voix de Marie Curie
En 1931, à Paris, Marie Curie reçoit la médaille d'or de l'American College of Radiology (ACR). L'ACR a fait don au Musée Curie de la pellicule du film que vous pouvez visionner ici dans une version numérisée.
Postérité
Irène et Frédéric Joliot-Curie découvrent, au sein de l’Institut du Radium, le phénomène de radioactivité dite artificielle en janvier 1934. Marie a la satisfaction de voir sa fille et son gendre faire une découverte majeure dans son laboratoire.
Elle n'est malheureusement pas témoin de l’attribution du prix Nobel de chimie aux Joliot-Curie en décembre 1935 : elle décède d’une leucémie le 4 juillet 1934 à Sancellemoz en Haute-Savoie. On peut vraisemblablement attribuer la maladie à ses travaux sur la radioactivité et à son utilisation des rayons X durant la Première Guerre mondiale.
Marie Curie incarne une figure de pionnière. Elle a posé, par ses recherches incessantes, les bases d’une nouvelle branche de la physique, et, première femme à obtenir une telle reconnaissance scientifique, elle s'avère être une source d'inspiration de nombreux(ses) scientifiques dans le monde entier.
La reconnaissance du grand public, qui ne fait qu’augmenter au fil du temps, atteint son apogée le 20 avril 1995 : sa dépouille entre au Panthéon avec celle de Pierre Curie. La France rend ainsi hommage à la jeune immigrée polonaise, devenue une des grandes figures scientifiques du XXe siècle.
Bibliographie
Vous trouverez ci-dessous une courte bibliographie accessible à tous, afin d'approfondir vos connaissances sur la vie et l'œuvre scientifique de Marie Curie.
Madame Curie par Ève Curie, éditions Gallimard, collection Folio, 1938
« Elle est femme, elle appartient à une nation opprimée, elle est pauvre, elle est belle. Une vocation lui fait quitter sa patrie, la Pologne, pour étudier à Paris où elle vit des années de solitude, de difficulté. Elle rencontre un homme qui a du génie comme elle. Elle l'épouse. Leur bonheur est d'une qualité unique. Par l'effort le plus acharné et le plus aride, Marie et Pierre Curie découvrent un corps magique, le radium. Leur découverte ne donne pas seulement naissance à une nouvelle science et à une nouvelle philosophie : elle apporte aux hommes le moyen de soigner une maladie affreuse. Au moment même où la gloire arrive, son merveilleux compagnon lui est ravi par la mort. Malgré la détresse du cœur et des maux physiques, elle continue seule la tâche entreprise, et développe avec éclat la science créée par le couple. »
Ève Curie
Marie Curie et la Grande Guerre par Anaïs Massiot et Natalie Pigeard-Micault, éditions Glyphe, 2014
Notes de l'éditeur :
« Eté 1914, Marie Curie aménage son laboratoire dans le tout nouvel Institut du Radium. Mais l'histoire est en marche et la Première Guerre mondiale éclate. Ses collaborateurs au front, Marie Curie ne s'enferme pas dans son laboratoire. Au contraire, elle en sort et fait tout ce qui est en son pouvoir pour se rendre utile. Elle met au service de la France ses connaissances scientifiques, au travers de la radiologie et la radiumthérapie. Elle va plus loin et mobilise les ressources humaines, matérielles et financières au profit des blessés. Elle s'inquiète de ses proches, fait circuler les nouvelles. Richement illustré, ce petit ouvrage se propose de raconter sous toutes ses facettes ce que fut la vie de Marie Curie durant la Grande Guerre. Après ces quatre longues années de conflit, Marie Curie, comme tant d'autres, ne sera plus la même. »
Leçons de Marie Curie par Isabelle Chavannes, éditions EDP Sciences, 2003
Notes de l'éditeur :
« Voici un document exceptionnel, retrouvé par miracle dans une cave : il livre les comptes-rendus de cours élémentaires de physique, que Marie Curie donna en 1907 à sa fille Irène et aux enfants de ses collègues dans le cadre d'une "coopérative d'enseignement". Ils sont écrits de la main de l'une de ses élèves, Isabelle Chavannes, et sont ici retranscrits dans leur intégralité. Marie Curie a imaginé elle-même ces leçons, destinées aux enfants d'une dizaine d'années. Claires, inventives amusantes, elles reposent sur le questionnement et l'expérimentation. Aussi fraîches et pertinentes qu'il y a un siècle, ces leçons raviront les parents, enseignants et curieux de tous les âges. »
Lettres de Marie Curie et ses filles, rassemblées par Monique Bordry et Hélène Langevin, éditions Pygmalion, 2011
Lors du décès accidentel de Pierre Curie en 1906, la fille aînée de Marie Curie, Irène, n'a que neuf ans et la cadette, Ève, deux ans. Les lettres échangées entre mère et filles rassemblées dans ce livre nous plongent dans leur intimité familiale et rapportent petits et grands événements de leur vie, jusqu'au décès de Marie Curie, en 1934. Elles témoignent des liens harmonieux qui ne cessèrent de se développer entre elles, au fil des ans. On découvre trois brillantes personnalités, liées par une affection intense et indéfectible. Édition réalisée par Hélène Langevin-Joliot, fille d'Irène Joliot-Curie, petite-fille de Marie Curie, et Monique Bordry qui a été directrice du Musée Curie.
Marie Curie, La fée du radium, par Chantal Montellier et Renaud Huynh, éditions Dupuis Pygmalion, 2011
Née en 1867, Marie Curie est la seule femme à avoir reçu deux prix Nobel : le prix Nobel de physique en 1903, qu'elle partage avec Pierre Curie son mari, puis le prix Nobel de chimie pour ses travaux sur le polonium et le radium en 1911. Elle fut par ailleurs la première femme à enseigner à la Sorbonne en 1906. La partie dessinée de l'album, réalisée par Chantal Montellier, se situe au moment où Marie Curie reçoit son second prix Nobel, alors qu'une violente campagne de presse se déchaîne contre elle. Sa liaison avec le physicien Paul Langevin, rendue publique, lui fut amèrement reprochée. De souvenirs en flash-back, nous sont contés les moments-clés de son existence et de sa carrière, déjà exceptionnelles en soi, et davantage encore si l'on se rappelle du peu de place accordée aux femmes dans le domaine de la recherche à l'époque.
Marie Curie, une femme de science par Françoise Grard et Emmanuel Cerisier, éditions Gulf Stream, 2011
Notes de l'éditeur :
« Polonaise de cœur et Française d'adoption, dotée d'une intelligence et d'une force de caractère peu communes, Marya Sklodowska était un être d'exception. Première femme à occuper une chaire scientifique à la Sorbonne, deux fois prix Nobel (de physique en 1903 et de chimie en 1911), Marie Curie fut également une des premières femmes à vivre la science comme un métier, qu'elle mit un point d'honneur à accomplir avec honnêteté. Épaulée par son époux Pierre Curie, sa découverte du radium révéla au monde entier l'existence de la radioactivité. Marie Curie est aujourd'hui encore un exemple pour tous les chercheurs. »
Marie Curie par Laura Berg et Stéphane Soularue, éditions Naïve, 2015
Notes de l'éditeur :
« Une nouvelle femme fait son entrée dans la collection de bandes dessinées "Grands Destins de Femmes". Laura Berg et Stéphane Soularue retracent le parcours de Marie Curie, une femme de science et de coeur. Deux fois prix Nobel, première femme à enseigner à la Sorbonne, elle marie, pour les générations actuelles et futures, le talent, l'intelligence et la volonté permanente d'émancipation. »
Marie Curie par Patricia Crété, Bruno Wennagel et Mathieur Ferret, éditions Quelle Histoire, 2015
Notes de l'éditeur :
« La vie de Marie Curie racontée aux enfants. De son enfance à Varsovie à l'obtention du prix Nobel de physique en 1903 avec son époux, Pierre Curie, en passant par ses recherches sur le radium, le destin de la plus célèbre femme scientifique est fascinant. Quelle Histoire propose une initiation accessible à l'histoire de cette grande chercheuse. » Pour les 6/10 ans.
À propos
Cette exposition virtuelle a été conçue comme le prolongement naturel de l'exposition itinérante « Marie Curie 1867-1934 ». Créée en 2011 par le Musée Curie pour l'année internationale de la Chimie, elle commémorait le centenaire du prix Nobel de Chimie de Marie Curie.
Traduite en plusieurs langues, l'exposition n'a, depuis, cessé de circuler à travers le monde. Il est toujours possible de la louer : pour tous renseignements, cliquez ici.
Crédits
Exposition réalisée par le Musée Curie, avec le soutien du Ministère des Affaires Etrangères et Européennes, de l'Association Curie et Joliot-Curie, de l'Institut français, de l'Institut Curie et du CNRS.
L'ensemble des images proviennent des Archives du Musée Curie.
Réalisation de l'exposition virtuelle
Xavier Reverdy-Théveniaud
Avec l'aide de
Annael Le Poullennec et l'équipe du Pôle Ressources et Savoirs, PSL